l'alphabet Pahawh, inventé par un illétré

Il existe un alphabet inventé par un illettré: c'est l'alphabet Pahawh,  conçu en 1959 pour les langues hmong par un paysan du Laos: Song Lue Yang. 

Les premières formes d'écriture hmong datent du début du XXème siècle, à l'initiative des missionnaires, et basées sur l'alphabet latin. Mais le seul alphabet hmong mis au point par un locuteur natif, lao-hmong, est celui de Song Lue Yang: le Pahawh. Il s'agit d'un alphabet semi-syllabique, qui a la particularité d'être le seul alphabet non syllabique créé par une personne illettrée. 
Shong Lue Yang, originaire du nord du Laos près de la frontière vietnamienne, eut le sentiment que cet aplhabet lui avait été révélé par Dieu, et cette croyance est partagée par beaucoup de Hmong. La création de cet alphabet avait pour but de diffuser la culture hmong. Shong Lue Yang fut assassiné par le gouvernement en 1971, inquiet de son influence grandissante. 
Shong Lue Yang a par ailleurs tenté sans succès de mettre en place un alphabet pour une langue Khmu (langue membre de la famille des langues Mon-Khmer)
Concernant l'alphabet Pahawh Hmong, on remarque que
- les syllabes sont écrites avec les voyelles en premier puis les consonnes, mais celles-ci sont les premières à être prononcées.
- le hmong a 8 tons qui sont indiqués dans l’alphabet Pahawh par des signes diacritiques.
- Bien que seuls quelques Hmong utilisent cet alphabet, nombreux sont les Hmong à être fiers de la création de cet alphabet par l’un des leurs.

La principale difficulté du hmong pahawh, selon le linguiste Lemoine qui étudia l'ensemble des alphabets hmong connus, réside dans la notation des tons, et dans le fait de devoir trouver un signe invariable pour chaque ton sur chaque voyelle, ce qui demande une analyse phonologique stricte, que l'auteur de l'alphabet, malgré son génie, ne pu pas produire, ce qui l'a amené à employer des signes différents pour transcrire la même voyelle à différents tons, et du même signe diacritique pour distinguer entre elles les voyelles sans tenir compte du ton. Cela complique en effet considérablement la lecture, à moins de se donner la peine de mémoriser toutes ces graphies. 

Les caractères de cet alphabet se sont pas très éloignés de ceux qu'on retrouve dans les alphabets indiens utilisés par les taï du Tonkin et des laotiens, certains se rapprochent de l'alphabet romain ou encore du cyrillique, bien qu'aucune concordance phonétique se soit observée dans la lecture. Ces similitudes sont possibles car dans le nord du Laos, se trouve une quantité de matériel militaire de récupération en provenance des pays de l'Est de l'Europe, des Etats-Unis d'Amérique, et de la Chine. Ce matériel, comme tout ce qui pouvait l'entourer, porte des inscriptions qui ont probablement inspiré son auteur dans la création de cet alphabet.